2014 fut définitivement une année pauvre en lectures.
J’ai terminé 28 livres, soit quelques 13 000 pages (460 pages par livre en moyenne, j’ai toujours aimé les pavés !). Bien loin des 53 livres lus l’année dernière. Bien loin de mon objectif de l’année de 60 livres. Un nouveau travail depuis janvier, des horaires qui gonflent naturellement quand on est investie et passionnée, la fatigue du soir qui vous tombe dessus au point que même lire devient épuisant ne suffiraient pas à expliquer ce bilan catastrophique. Une petite faille s’est glissée dans mes heures de liberté, et elle avale le temps avec gourmandise en riant sous cape de ma faiblesse. J’ai nommé mon Candy Crush enneigé, La Reine des neiges Free Fall. Je pense que le temps que j’y ai consacré cette année peut se compter en semaines. Sérieusement.
Mais, la fatigue aidant, s’est aussi généralisé un autre phénomène : les livres abandonnés. Je n’ai jamais vraiment hésité à laisser tomber une lecture lorsqu’elle ne me plaisait pas, soit en me disant que je passais à côté d’un beau texte et qu’il faudrait que j’y revienne plus tard (je crois qu’on « reçoit » un livre différemment selon son humeur, le contexte dans lequel on le lit…), soit simplement en constatant que ça ne m’intéressait pas et qu’on ne m’y reprendrait plus. Mais cette année, j’ai vraiment abandonné beaucoup de livres.
En voici un aperçu, pour commencer par quelques petites piques :


Là où les tigres sont chez eux, d’Emmanuel Blas de Roblès : j’avais acheté ce livre lorsque j’ai beaucoup entendu parler de L’île du Point Nemo. Au bout de 100 pages, je m’endormais. Laissé de côté pour l’instant, mais je ne doute pas d’y retourner un jour prochain.
L’excellence de nos aînés, d’Ivy Compton-Burnett : je ne sais plus comment je suis tombée sur ce livre, mais la couverture me plaisait, le titre aussi, le sujet encore plus. Et puis au bout de 80 pages de dialogues sans queue ni tête ni le début d’une histoire, j’ai laissé tomber.
Le chapeau de Mr Briggs, de Kate Colquhoun : conseillé par Titine, acheté sur le Salon du Livre. Et puis à peine commencé, déjà abandonné. À reprendre sans tarder.
Orlando, de Virginia Woolf : l’oeuvre de Virginia Woolf me fascine mais ce récit-là, entre le mythe et le rêve, ne se laisse pas facilement lire dans le métro. Faute de concentration, j’ai préféré le mettre de côté pour le reprendre plus tard au calme. L’occasion ne s’est pas encore présentée.
Rebecca, de Daphé Du Maurier : j’ai découvert le film cette année et ce fut un vrai choc. J’ai littéralement été scotchée pendant deux heures par Joan Fontaine et Laurence Olivier. J’ai voulu lire le livre dans la foulée, grosse erreur : connaissant déjà l’intrigue, je ne suis pas rentrée dans l’atmosphère sombre et inquiétante créée par l’auteur. Je vais laisser passer un peu de temps avant de réessayer.
Les amoureux de Sylvia, d’Elizabeth Gaskell : vous savez comme j’ai aimé Nord et Sud et Cranford et Ruth. Alors, une nouvelle traduction d’Elizabeth Gaskell et je me jette dessus ! Pourtant, l’histoire de cette coquette écervelée de Sylvia qui, dans sa maison du bord de mer, fantasme sur les harponneurs de baleine et ne voit pas son cousin qui en pince pour elle m’a laissée de glace. Mis de côté au bout de 180 pages (j’ai voulu y croire…). Ce n’est pas dans ce roman que vous retrouverez le souffle de Nord et Sud !
Plan de table, de Maggie Shipstead : annoncé comme une comédie grinçante sur le mariage d’une famille déjantée, Plan de table m’a assommée avec des situations sans originalité, des personnages caricaturaux et une vulgarité inutile. Hop, sorti de ma PAL !
Outlander, tome 1, Diana Gabaldon : aïe aïe aïe, je sens déjà que je vais m’attirer les foudres des adeptes de cette série qui m’est pourtant tombée des mains à peu près à la moitié ! Je dois avoir l’esprit trop cartésien pour faire l’impasse sur les incohérences historiques et narratives que l’auteur nous impose pour suivre son idée de départ : une jeune femme des années 1940 se retrouve plongée dans l’Ecosse du XVIIIe siècle et tombe amoureuse d’un Highland à tartan. Bye bye, Sassenach !
Mais revenons à des avis plus positifs, il y a aussi eu de très belles découvertes.
Mes coups de cœur de l’année !

Le Chardonneret restera sans doute l’un des souvenirs les plus marquants de cette année. Un roman fleuve, non sans longueurs à mon avis, mais aussi de splendides morceaux de littérature, un style puissant et évocateur, capable de passer du huis-clos au road movie, du thriller au roman d’apprentissage. La scène d’ouverture, relatant un attentat au MOMA de New York du point de vue du jeune héros au cœur de l’explosion d’une bombe, reste gravée à jamais dans mon esprit.
Bien sûr, je ne peux pas évoquer cette année sans parler de notre géniale expérience de Lecture Coachée de Guerre & Paix. Je suis ravie d’avoir pu entraîner quelques copines dans cette aventure et je les remercie vraiment de m’avoir suivie (Caro, Shelbylee, Praline, Romanza). C’était ma troisième relecture et je me suis toujours autant régalée. Aucune description ne me semble trop longue, aucune ligne ne serait à retrancher à cette fresque monumentale qui s’interroge sur la place de la volonté humaine dans le déroulement de l’Histoire autant que sur les émois de Natasha face au prince André. Même si je n’ai pas chroniqué ce livre ici, j’ai bien aimé accompagner la découverte du roman avec un billet un peu différent, qui conjugue mon goût pour l’histoire avec mon amour pour Tolstoï.
Parmi mes autres coups de cœur de l’année dont j’ai déjà parlé : La marche de Radetzky, de Philip Roth, Père, d’Elizabeth von Arnim, Le Siècle des Lumières, d’Alejo Carpentier, Adèle et moi, de Julie Wolkenstein.
Mes auteurs chouchous

Mari et femme, de Wilkie Collins : après ma découverte de cet auteur avec Drood et Pierre de lune, je voulais replonger. Le sujet du mariage m’a toujours inspirée dans le choix de mes lectures et ce fut une réussite ! À partir de presque rien, quelques lignes griffonnées au dos d’une lettre, Wilkie Collins nous entraîne dans un tourbillon de faux mariages, de vrais attachements, de trahisons et de courage pour dénoncer avec brio la dépendance des femmes dans le mariage à l’ère victorienne et la législation parfois absurde qui unit mari et femme. Un très bon cru !
Sur les rives de l’Hudson, d’Edith Wharton : ce premier tome suivi de Les Dieux arrivent nous raconte l’histoire de Vance Weston, jeune romancier prédit à un brillant avenir mais dont la carrière ne dépassera pas ces espérances, entraînant avec lui sa jeune femme naïve. Encore une fois, Wharton met nos nerfs à l’épreuve avec cette plongée dans les abysses d’un homme dont le destin lui échappe. J’ai cependant été moins conquise que par Chez les heureux du monde, sans doute parce que j’ai éprouvé beaucoup moins d’empathie pour son héros que pour Lily Barton.
Je suis en revanche un peu passée à côté d’Ethan Frome, de la même auteur, dont le propos s’est révélé bien trop déprimant et sombre. Peut-être n’était-ce pas une bonne idée de lire un livre qui se passe dans un Massachusetts enneigé en plein mois de mai.
Infidélités, de Vita Sackwille-West : merci à Autrement et au Livre de Poche de nous faire redécouvrir l’immense talent de cette auteur pour laquelle on ne doute plus de mon admiration. Ce recueil de nouvelles est à l’image du reste : un bijou.
Le docteur Thorne, d’Anthony Trollope a confirmé mon intérêt pour cet auteur victorien à l’ironie douce-amère si britannique ! Aucun suspense dans cette histoire car nous savons bien que le docteur Thorne, qui a recueilli la jeune Mary et l’élève comme sa fille, favorisera son rapprochement avec le jeune Francis Gresham, fils de l’aristocratie du comté. Comme dans Quelle époque ! et Miss Mackenzie, Trollope allie l’humour et sa parfaite connaissance du cœur humain pour nous offrir un récit très riche malgré une ligne narrative simple. Querelles de village, manœuvres politiques, héritages compromis, jalousies féminines… on sourit, on apprend, on s’inquiète, bref, un vrai plaisir de lecture !
Ce jeune homme [Francis Gresham] aura notre faveur, figurera dans les scènes d’amour, aura ses épreuves et ses problèmes et les surmontera ou non, selon les cas. Je suis trop vieux maintenant pour être un écrivain au cœur insensible, et il est donc probable qu’il ne mourra pas de chagrin.
Un bon moment…

L’Abyssin, de Jean-Christophe Rufin : un bon roman historique, une belle plume et un exotisme bienvenu sont les atouts de ce roman basé sur des faits réels, l’ambassade de Jean-Baptiste Poncet au royaume du Négus, ancien royaume d’Ethiopie. La bleuette avec la fille du consul du Caire fait un peu plaqué, mais le contexte historique est passionnant et on se laisse porter !
Certaines n’avaient jamais vu la mer, de Julie Otsuka : heureusement que ce roman est court, car le choix narratif du « nous » qui exprime les nombreuses voix de ces Japonaises arrivant en Amérique peut être lassant. Heureusement que cette histoire est portée par un style plein de pudeur et de retenue, car les sujets évoqués auraient pu être simplement du voyeurisme. Heureusement, c’est un très beau texte.
Pour une fois, de David Nicholls : une comédie acide sur les coulisses du cinéma dans lesquelles David Nicholls promène son héros de « presque » en « peut-être ». Pour une fois, ce sera peut-être lui la star. Un bon roman de vacances, même si on est très loin de l’émotion dégagée par Un jour !
Cette année vit aussi arriver dans mes lectures des essais, et je suis plutôt contente de pouvoir varier un peu avec ces grands récits d’Histoire qui me ramènent à mes études : Requiem pour un empire défunt, de François Fejtö, et Louis XIII, de Jean-Christian Petitfils, un roi méconnu mais un si grand souverain, servi par la plume superbe et alerte d’un historien qui sait aussi se faire romancier.
Voilà, ce bilan (puisque ça y ressemble fortement) s’achève ! J’espère que vous y trouverez quelques idées de lecture. Moi, cela m’a donné envie de remettre plus de livres dans ma vie en 2015 ! Je vais commencer par désinstaller cette application maudite… ah tiens, on m’offre trois vies ? bon, alors juste une petite partie, et après, j’arrête !